Comment éviter l’écoblanchiment ? L’écoblanchiment en finance

Comment éviter l’écoblanchiment ? L’écoblanchiment en finance

« Investir dans notre planète » est le thème du Jour de la Terre 2022. L’engouement pour les fonds et les produits de placement tenant compte des facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) a aussi amené une augmentation des fausses prétentions écologiques, appelées l’écoblanchiment. Les conseillers financiers doivent se méfier de ce piège qui peut leur coûter la confiance de leurs investisseurs. Voici quelques conseils.

Le Jour de la Terre est célébré annuellement depuis le 22 avril 1970. Cette année est consacrée à l’influence des climats économiques et politiques sur les changements de comportement individuel en faveur de la planète. Il s’agit d’un appel à tous (entreprises, gouvernements et citoyens) pour être responsable et rendre des comptes.

La majorité des investisseurs en ont pris bonne note en ajoutant les critères ESG à leur politique de placement. Ainsi, les placements ESG ont rapidement gagné en popularité, déboulonnant finalement le mythe du dilemme entre rendement et investissement éthique ou écoresponsable. D’autant plus que les recherches indiquent que les deux vont souvent de pair.

Malgré cette importante prise de conscience, le secteur de la finance éthique et durable est sous la loupe. De plus en plus d’investisseurs s’inquiètent des conséquences de l’écoblanchiment.

Qu’est-ce que l’écoblanchiment ?

La définition de l’écoblanchiment est complexe. De nombreuses entreprises accordent une importance croissante à l’adoption de pratiques durables et permettant de réduire l’impact environnemental de leurs activités. Cependant, certaines d’entre elles investissent davantage d’efforts dans la commercialisation de leurs produits ou de leur marque en tant qu’entreprises vertes que dans des changements réels. En concentrant leurs efforts sur le changement de perception des clients plutôt que de consacrer ces ressources à la durabilité, ces entreprises pratiquent l’écoblanchiment.

Le blanchiment écologique est donc une tactique mensongère de relations publiques par laquelle on tente de faire la promotion d’un produit, d’une action ou de politiques en utilisant de façon malhonnête des arguments écologiques.

Le coût de l’écoblanchiment

Même s’il n’est pas nouveau, ce phénomène a connu une forte progression dans les dernières années, nourri par l’engouement des consommateurs pour l’écologie. Une recherche de Quilter, un chef de file en gestion de patrimoine basé au Royaume-Uni, rapporte que la plus grande inquiétude de 44 % des investisseurs touche l’investissement responsable et les ESG.

Perte de confiance envers les conseillers

Sans surprise, l’une des conséquences directes de l’écoblanchiment est la perte de confiance irréparable de l’investisseur envers son conseiller financier alors que ceux-ci passent des années à développer de bonnes relations avec leurs clients et une bonne réputation dans le milieu. Recommander des entreprises qui pratiquent l’écoblanchiment peut nuire considérablement à leurs efforts et conduit souvent à la conséquence ultime : la perte de leur clientèle.

Les initiatives d’écoblanchiment peuvent avoir comme impact l’ajout d’entreprises à des fonds durables en dépit de leur nature même, comme des sociétés pétrolières et gazières ou des entreprises qui tentent simplement de tirer parti de la tendance du développement durable.

L’argent des investisseurs est siphonné par les efforts d’écoblanchiment

L’écoblanchiment a un impact à la fois sur l’écologie et sur les investisseurs, mais aussi sur les entreprises véritablement respectueuses de l’environnement. Puisque ces dernières modifient activement leurs opérations et adoptent des pratiques durables, elles voient l’attention être siphonnée par de grandes entreprises concurrentes qui investissent plutôt dans le marketing de blanchiment écologique.

Comment les solutions en gestion de placement aident les investisseurs en ESG ?

C’est indéniable, les FinTech ont complètement transformé l’industrie de la gestion de patrimoine. Cette transformation inclut la simplification du processus d’analyse et d’investissement des ESG. En effet, les logiciels, les outils et les services des FinTech sont une façon nouvelle et novatrice d’aider les conseillers financiers et les gestionnaires de portefeuille à s’orienter dans le dédale des placements ESG. Ils leur permettent aussi de mesurer précisément la durabilité et l’impact d’un investissement socialement responsable dans un fonds ou un produit de placement.

Les solutions de gestion en placement ESG peuvent aider les conseillers à cibler les meilleures occasions pour leurs clients en matière d’ESG et à optimiser le retour sur l’investissement. Dans le cas d’un actionnaire, il s’agit de faciliter la gestion des placements ESG, et dans le cas des clients, il s’agit de les aider à s’orienter dans l’ensemble complexe que représentent les placements ESG.

Aujourd’hui, les solutions de gestion des ESG fournissent des données qui permettent aux gestionnaires de patrimoine d’intégrer une variété de facteurs ESG dans le flux du travail, incluant les analyses de portefeuilles, les recherches sur les valeurs mobilières, le filtrage et les analyses quantitatives. Les gestionnaires de patrimoine peuvent ensuite passer au crible un large pourcentage du marché mondial total en fonction de paramètres ESG prédéterminés, client par client, et développer ainsi une stratégie d’investissement qui répond au mieux aux besoins de leurs clients, à leurs priorités en matière de durabilité et à leurs objectifs d’investissement à long terme.

Conseils pour éviter l’écoblanchiment

La semaine dernière, le Comité de normalisation des fonds d’investissement du Canada (CIFSC) a publié une deuxième version de son texte Responsible Investment Identification Framework (cadre d’identification des fonds ESG) relativement aux fonds communs de placement, aux fonds négociés en bourse, aux fonds distincts et aux organismes de placement collectif.

Le but de ce document est d’établir des normes concrètes d’identification afin de guider les investisseurs canadiens et leurs conseillers, ainsi que d’aider les investisseurs et les émetteurs de fonds communs de placement à utiliser le même langage et les mêmes définitions. Ce document traite de six enjeux des ESG : l’intégration et l’évaluation, les placements thématiques, l’exclusion, l’investissement à retombées sociales, l’engagement et la gérance financière, et une sélection des premiers de classe.

L’instauration récente du International Sustainability Standards Board devrait aussi contribuer à établir des normes relatives aux fonds ESG. Il y a cependant du pain sur la planche avant de rendre les fonds et les produits de placement ESG totalement transparents.

Même si l’établissement de normes mondialement acceptées sur les indicateurs d’ESG n’est pas pour demain, il y a plusieurs façons d’éviter l’écoblanchiment sans compromettre le rendement des placements et sans perdre sa clientèle.

Les conseillers en placement disposent des outils nécessaires pour aider les investisseurs durables

Les conseillers en placement et les planificateurs financiers doivent aider leurs clients à déchiffrer l’information sur les produits que l’on retrouve dans les brochures et les prospectus. Ils doivent aussi guider leurs clients de manière à ce qu’ils comprennent la méthodologie qui entoure le caractère durable d’un fonds ou d’un produit de placement. Ainsi, le client pourra évaluer si cette méthodologie correspond à ses exigences en matière d’ESG. Mais cette tâche peut être extrêmement énergivore.

Heureusement, les entreprises en gestion de patrimoine et les professionnels du domaine ont une variété de fonctionnalités à leur disposition pour y arriver. Ils peuvent accélérer le processus en fournissant un accès immédiat aux données sur les ESG, aux recherches sur les fonds individuels et les compagnies qui décident d’investir dans ces fonds. Les investisseurs peuvent rapidement déterminer le vrai caractère durable d’un fonds et son rendement à jour, de manière à prendre des décisions de placement éclairées.


En savoir plus sur le blanchiment écologique dans la finance

Que sont les fonds ESG ?

ESG est l’abréviation des facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance et constitue une approche holistique de l’investissement. Les fonds ESG sont des portefeuilles d’actions ou d’obligations dans lesquels des facteurs tels que les questions environnementales, sociales et de gouvernance ont été pris en compte. Ils sont intégrés dans le processus de sélection des entreprises ou des gouvernements qui seront ajoutés aux fonds. Ces entreprises et gouvernements ont passé des tests rigoureux pour déterminer leur impact sur les critères ESG.

Quels sont les exemples d’écoblanchiment ?

Une organisation peut pratiquer l’écoblanchiment de différentes manières, par exemple :

  • Une organisation prétend qu’elle est « soucieuse de l’environnement », alors qu’en fait, l’organisation n’a pas d’initiatives vertes concrètes pour réduire des facteurs, tels que les émissions de carbone ;
  • Une entreprise investit plus d’argent en publicité pour ses marques écologiques qu’elle n’en dépense pour des pratiques vertes positives ou des programmes de durabilité ;
  • Une entreprise réduit sa production de déchets au cours de la fabrication, mais ne fabrique pas de produits durables, et finit par créer davantage de déchets ;

Ces dernières années, de nombreuses grandes entreprises ont été accusées d’écoblanchiment. Leurs finances comme leur réputation en ont beaucoup souffert. C’est le cas du géant de l’automobile Volkswagen qui a été pris en flagrant délit d’écoblanchiment dans le scandale du « Dieselgate ». Le constructeur allemand avait fait une fausse déclaration concernant ses voitures diesel, affirmant qu’elles émettaient moins d’émissions que les autres modèles et en vendant ensuite plus de 11 millions de ces modèles. En réalité, un logiciel installé dans les voitures réagissait aux tests d’émissions pour manipuler les résultats. La réputation de l’entreprise et la confiance des investisseurs en ont été fortement affectées.

Une autre tentative de blanchiment écologique a été menée par la multinationale pétrolière BP. À l’origine British Petroleum, elle a changé de nom pour devenir Beyond Petroleum et a installé des panneaux solaires pour alimenter ses pompes à essence. Le marketing de ces changements a induit certains investisseurs en erreur en leur faisant croire que la compagnie pétrolière essayait activement de résoudre notre problème environnemental actuel.

Comment éviter les entreprises écoblanchies ?

Pour éviter l’écoblanchiment, les compagnies peuvent se faire certifier écoresponsable par des organismes d’authentification indépendante. Toutefois, ce processus est coûteux et doit être mis à jour régulièrement, ce qui rend la surveillance de chaque compagnie dans laquelle un fonds est investi spécialement complexe.

Qu’est-ce qui rend le blanchiment écologique possible dans l’industrie financière ?

En ce moment, la diffusion des performances ESG n’est pas une obligation réglementaire, mais les entreprises commencent à utiliser les informations sur la durabilité et la responsabilité sociale pour fournir aux investisseurs une perspective plus détaillée de leurs activités. De plus en plus d’entreprises publient des rapports sur la durabilité et la responsabilité sociale, qui fournissent également des données et des mesures.

Cependant, l’inefficacité de la surveillance et de la vérification externes de la part des organismes de réglementation est un facteur clé de la montée de l’écoblanchiment. Un autre problème auquel sont confrontés les conseillers en investissement est le manque de normalisation : il existe de nombreux fournisseurs de données ESG qui proposent des évaluations ESG différentes. Cette diversité et l’essor relativement récent de la durabilité font qu’il est difficile de savoir quelles sources de données sont fiables, ce qui permet à des entreprises de passer entre les mailles du filet et d’être ajoutées à des fonds.

Comment reconnaître les stratégies d’écoblanchiment ?

De nombreuses entreprises sont expertes en écoblanchiment et, au fil des ans, plusieurs formes d’écoblanchiment ont été utilisées. Voici les tactiques d’écoblanchiment les plus courantes utilisées par les organisations :

Divulguer des informations stratégiques sur les produits

Il arrive que les entreprises ne mentionnent pas que les produits qu’elles fabriquent peuvent avoir des effets néfastes sur l’environnement. Un bon exemple est celui des véhicules électriques (VE), vantés comme étant écologiques par leurs fabricants parce qu’ils n’utilisent pas de combustibles fossiles, même si les émissions de carbone causées par la production des batteries au lithium sont extrêmement dommageables. Les consommateurs sont rarement conscients des problèmes liés aux batteries.

Utiliser des initiatives symboliques pour donner une image verte à une entreprise

De nombreuses marques attirent l’attention sur une action positive mineure qui ne change pas grand-chose à leur empreinte environnementale globale et la présentent comme leurs efforts en matière de durabilité. Cette action est souvent teintée d’ironie, car l’initiative verte d’une entreprise tente d’aider des situations directement causées par ses propres activités. Un exemple parfait est celui d’une compagnie pétrolière qui fait don de savon pour nettoyer les animaux pris dans une marée noire.

Utiliser des déclarations générales et vagues dans leur communications

L’écoblanchiment est lié à la tromperie. Dans ce cas, une entreprise peut utiliser un langage vague pour faire une déclaration environnementale qui ne peut pas être vérifiée et qui la déresponsabilise, comme « nous utilisons de nouveaux matériaux améliorés ».

Présenter des informations non pertinentes sur les produits

Les entreprises peuvent faire paraître des produits plus écologiques en présentant une allégation verte qui n’est pas pertinente et qui a peu d’impact sur l’environnement. Il s’agit de déclarations qui, sans être de fausses affirmations, donnent aux consommateurs l’impression d’acheter des produits écologiques. Par exemple, les aérosols sont présentés comme des produits verts parce qu’ils sont exempts de CFC, alors que les CFC sont illégaux depuis des décennies.

Exploiter les données

Cette stratégie de communication est très courante et consiste à présenter des données exagérées qui donnent une image positive d’une entreprise. Un bon exemple serait celui d’un fabricant d’emballages augmentant la proportion de contenu recyclé de 4 % à 6 % afin d’affirmer que ses produits d’emballage utilisent désormais 50 % de matériaux recyclés en plus. On pourrait prétendre que l’impact positif et les efforts de durabilité ne sont pas représentés équitablement.

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